Date de publication : 31 janvier 2025

L’assurance vie est depuis longtemps un pilier de l’épargne en France, appréciée pour sa flexibilité et ses avantages fiscaux. Ce produit financier, utilisé autant pour constituer un capital que pour préparer la retraite ou transmettre un héritage, offre diverses options au moment de la sortie. Parmi celles-ci, la conversion du capital en rente viagère semble séduisante sur le papier : elle promet un revenu régulier à vie, éliminant les incertitudes liées à la gestion du capital et au risque de longévité. Pourtant, derrière cette apparente tranquillité se cachent des inconvénients majeurs, souvent sous-estimés. La perte de flexibilité, la faible rentabilité ou encore l’impossibilité de transmettre le capital aux héritiers soulèvent de nombreuses interrogations. Alors, la sortie en rente est-elle vraiment un choix judicieux, ou s’agit-il d’une fausse bonne idée ? Cet article se propose d’explorer les avantages, les limites, et les alternatives à cette option souvent méconnue.

1. Comprendre la sortie en rente en assurance vie

La sortie en rente, également appelée rente viagère, est l’une des options offertes aux détenteurs d’une assurance vie pour récupérer leur épargne. Contrairement à une sortie en capital où l’épargnant perçoit l’intégralité de la somme accumulée, la rente viagère consiste à transformer ce capital en un revenu régulier, versé à vie. Cette option repose sur un principe simple : le souscripteur cède son capital à l’assureur, qui en échange s’engage à lui verser une somme périodique (mensuelle, trimestrielle, ou annuelle) jusqu’à son décès.

Il existe plusieurs types de rentes pour répondre aux besoins spécifiques des épargnants :

  • La rente viagère simple : un revenu versé uniquement au souscripteur, qui cesse à son décès.
  • La rente réversible : une option qui permet de transférer tout ou partie de la rente au conjoint survivant en cas de décès, souvent au prix d’un montant initial réduit.
  • La rente avec annuités garanties: elle garantit un versement minimum pendant une période définie, même en cas de décès prématuré du bénéficiaire.

La conversion en rente viagère s’accompagne d’un calcul basé sur différents facteurs : le montant du capital, l’âge du souscripteur au moment de la conversion, son espérance de vie statistique, et les conditions économiques (notamment les taux d’intérêt). Plus le souscripteur est jeune, plus la rente annuelle sera faible, car l’assureur anticipe un versement sur une période plus longue.

Cette option offre des avantages évidents sur le papier, notamment une sécurité financière à vie, particulièrement précieuse pour les personnes craignant de vivre plus longtemps que leur épargne ne pourrait le permettre. Cependant, elle repose également sur des choix irrévocables : une fois la rente activée, le capital n’est plus disponible, ce qui pose la question de son adéquation avec les besoins réels de l’épargnant. Pour bien comprendre les implications de cette décision, il est crucial d’examiner les avantages et les limites de cette option en détail.

2. Les avantages potentiels de la sortie en rente

La sortie en rente viagère présente plusieurs avantages qui en font une option attractive pour certains épargnants, notamment ceux soucieux d’assurer leur sécurité financière sur le long terme.

1. Un revenu garanti à vie
Le principal atout de la rente viagère réside dans la garantie d’un revenu stable et régulier jusqu’au décès. Cette sécurité est particulièrement précieuse dans un contexte d’incertitudes économiques, où les placements peuvent être soumis à des fluctuations importantes. Pour les personnes craignant de « survivre » à leur capital, la rente viagère est une solution rassurante.

2. Une gestion simplifiée
Contrairement à une gestion en capital qui nécessite de planifier soigneusement les retraits pour éviter l’épuisement des fonds, la rente viagère ne demande aucun suivi actif. L’assureur se charge de tout, ce qui en fait une option adaptée aux épargnants ne souhaitant pas s’impliquer dans la gestion de leur épargne à la retraite.

3. Une fiscalité avantageuse
La fiscalité applicable à la rente viagère est souvent perçue comme attractive. Seule une fraction de la rente est imposable, cette part étant déterminée en fonction de l’âge du souscripteur au moment de la conversion. Par exemple, une personne ayant souscrit une rente à 70 ans n’est imposée que sur 30 % des montants perçus. Cela peut permettre de maximiser les revenus disponibles, surtout pour les personnes bénéficiant d’une retraite modeste.

4. Une protection contre les aléas de la vie
Dans certains cas, la rente viagère peut inclure des garanties supplémentaires, comme la réversibilité au profit du conjoint ou un versement minimum garanti sur une période donnée. Ces options permettent d’adapter la rente aux besoins spécifiques de l’épargnant et de sa famille, apportant une sécurité supplémentaire.

5. Une solution adaptée à certains profils
La sortie en rente est particulièrement avantageuse pour les épargnants ayant un besoin constant de revenus complémentaires, sans héritiers directs ou sans objectif de transmission patrimoniale. Elle répond également aux attentes des personnes prioritaires sur la stabilité financière par rapport à la souplesse ou à la rentabilité.

En résumé, la sortie en rente viagère séduit par sa promesse de stabilité, de simplicité et de sécurité. Cependant, si ces avantages en font une solution adaptée à certains profils, ils ne doivent pas occulter les limites importantes de cette option, que nous explorerons dans la section suivante.

3. Les limites et inconvénients majeurs

Si la sortie en rente viagère offre des avantages indéniables, elle comporte également des inconvénients significatifs qui peuvent la rendre inadaptée à de nombreux épargnants. Ces limites, souvent méconnues, doivent être examinées attentivement avant de prendre une décision irréversible.

1. Perte de capital et absence de transmission
Lorsque le capital d’une assurance vie est transformé en rente, l’épargnant renonce définitivement à la possibilité de le récupérer. En cas de décès prématuré, le solde du capital n’est pas transmissible aux héritiers, sauf si une rente réversible ou une garantie d’annuités a été souscrite. Cela peut être problématique pour ceux qui souhaitent préserver leur patrimoine pour leur famille.

2. Rentabilité souvent jugée faible
Les taux de conversion en rente, calculés sur la base de l’espérance de vie et des conditions économiques, sont souvent considérés comme peu attractifs. Avec la baisse des taux d’intérêt, les rentes viagères offrent généralement des montants modestes par rapport au capital initial, ce qui peut décevoir les épargnants.

3. Manque de flexibilité
Une fois la rente viagère choisie, il n’y a pas de retour en arrière possible. L’épargnant perd la liberté d’ajuster l’utilisation de son capital en fonction de ses besoins, qu’il s’agisse de dépenses imprévues, de projets personnels, ou de soutien à ses proches.

4. Avantage conditionnel à l’espérance de vie
La rente viagère est avantageuse uniquement pour les personnes qui vivent longtemps, permettant ainsi de « récupérer » l’intégralité du capital sous forme de revenus réguliers. Cependant, pour une personne ayant une espérance de vie réduite (par exemple, en raison de problèmes de santé), la rente viagère devient une option peu rentable, voire désavantageuse.

5. Frais et marges implicites
Le calcul de la rente prend en compte les frais de gestion et les marges des assureurs, ce qui peut réduire encore davantage les montants versés. Ces coûts, bien que parfois peu visibles, pèsent sur la rentabilité de l’option.

6. Risque d’inflation
La rente viagère est généralement fixe, sauf si une option d’indexation a été souscrite, ce qui est rarement le cas. Une rente non indexée perd de sa valeur réelle avec le temps, particulièrement en période d’inflation, rendant le revenu insuffisant pour maintenir un niveau de vie stable à long terme.

7. Méconnaissance des conditions et des implications
Enfin, de nombreux épargnants choisissent la rente viagère sans comprendre pleinement ses implications, influencés par les arguments de sécurité souvent mis en avant. Cette méconnaissance peut conduire à des choix inadaptés, non alignés avec leurs besoins ou leurs priorités.

En conclusion, la sortie en rente viagère impose de lourdes contraintes qui peuvent ne pas convenir à tous les épargnants. Si elle peut sécuriser un revenu stable à vie, elle sacrifie la flexibilité et la transmission du patrimoine, tout en souffrant d’une rentabilité parfois décevante. Dans cette optique, il est crucial de bien peser ses besoins et de considérer les alternatives possibles avant de s’engager dans une telle option.

Exemple chiffré : 

Comparons les deux options d’utilisation d’une assurance vie : rente viagère ou rachats réguliers. Nous avons construit un graphique basé sur les hypothèses suivantes :

  1. Client A (Rente viagère) :
    • Âge : 65 ans
    • Montant du capital : 300 000 €
    • Rente viagère mensuelle : Environ 1 200 € 
    • Durée : viagère
  2. Client B (Rachats réguliers) :
    • Âge : 65 ans
    • Montant du capital : 300 000 €
    • Rachats mensuels : 1 200 € (montant fixe, similaire au client A).
    • Croissance annuelle moyenne du contrat : 3 % environ (hypothèse réaliste pour un contrat d’assurance vie).

Les hypothèses pour le graphique :

  • Le client A continue de percevoir sa rente même si le capital initial est épuisé (grâce au principe de mutualisation des risques des rentes viagères).
  • Le client B voit son capital diminuer progressivement jusqu’à épuisement.

Nous sommes allés jusqu’à l’épuisement complet du capital pour le client B.

Pour le client B (rachats réguliers), le capital est complètement épuisé à l’âge de 97 ans. Cela signifie qu’il est plus rentable d’opter pour la sortie en rente uniquement si l’on vit plus de 97 ans.

Conclusion

La sortie en rente viagère en assurance vie est une solution qui, bien que séduisante sur le papier, ne convient pas à tous les profils d’épargnants. Si elle garantit un revenu stable à vie et offre une gestion simplifiée ainsi qu’un cadre fiscal avantageux, elle s’accompagne de contraintes majeures : perte de capital, faible rentabilité, manque de flexibilité, et absence de transmission patrimoniale. Ces inconvénients peuvent peser lourdement sur ceux qui recherchent une plus grande liberté dans l’utilisation de leur épargne ou souhaitent préserver leur capital pour leurs proches.

Cette option se révèle donc particulièrement adaptée à des profils spécifiques, comme les épargnants sans héritiers ou ceux qui privilégient avant tout la sécurité financière au détriment de la souplesse. Toutefois, pour beaucoup, d’autres alternatives, comme la sortie en capital ou des placements générateurs de revenus passifs, peuvent s’avérer plus avantageuses et mieux alignées avec leurs objectifs.

Face à une décision aussi engageante, il est essentiel de bien évaluer ses besoins, ses priorités et sa situation personnelle. Un conseil avisé, apporté par un professionnel, peut faire toute la différence pour éviter les pièges d’une solution inadaptée. La sortie en rente viagère n’est pas une mauvaise idée en soi, mais elle reste une solution qui doit être choisie avec prudence et après une réflexion approfondie.

Pour en savoir davantage sur la rente viagère et les options disponibles sur votre contrat, n’hésitez pas à contacter nos conseillers au 0180497000, qui se feront un plaisir de vous accompagner dans votre réflexion.

La sortie en rente en assurance vie : fausse bonne idée ?

Romain Cibois
Romain Cibois

Romain CIBOIS est Conseiller en Gestion de Patrimoine chez WeSave. Après des études en Ingénierie Patrimoniale au sein de l’IAE de Nantes puis de l’IUP Caen, il rejoint l’équipe de conseillers Wesave. Persuadé que les solutions digitales alliées à une expertise de qualité sont le futur de gestion de patrimoine. Son objectif est de mettre à profit ses compétences techniques et humaines dans le but de démocratiser la gestion de patrimoine et la rendre accessible au plus grand nombre.

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