Les indices d’actions sont pour la plupart en baisse sur l’année, mais la dispersion de comportement est très forte depuis le début du conflit en Ukraine. Les marchés européens, proches de la zone de guerre, ont retrouvé les niveaux d’avant conflit, mais le risque de pénuries physiques de matières premières inquiète les investisseurs. Les places éloignées, tel que le Japon, ou productrices de matières premières, comme le sont les États-Unis, subissent aussi des hausses de prix d’entrants, mais ont peu de risque de pénuries physiques : elles ont progressé durant cette période. Les investisseurs semblent donc s’inquiéter modérément du ralentissement économique, et poursuivent leurs achats d’actions, car c’est l’un des actifs permettant potentiellement de se protéger de la perte de pouvoir d’achat due à l’envol de l’inflation. Nous restons un peu surpondérés sur les actions.
La performance des actifs obligataires est la pire observée en un seul trimestre depuis des décennies. Dès le début d’année, les investisseurs craignaient que les Banques centrales ne doivent durcir fortement leurs politiques monétaires du fait de l’inflation due à la COVID. Mais le conflit en Ukraine a encore accentué les pressions inflationnistes en faisant s’envoler le prix des matières premières. La guerre en Ukraine a accordé un fugitif répit aux actifs obligataires, servant temporairement de refuge tactique, mais la tendance baissière a vite repris. Les obligations émergentes sont l’actif le plus pénalisé en 2022. Les obligations souveraines bénéficient d’une prime relative de solvabilité, et la Russie n’a pas fait de défaut de paiement. Les rendements réels négatifs des obligations souveraines nous incitent à maintenir notre sous-pondération sur cette classe d’actifs.
Les rendements des obligations d’entreprises se tendent fortement en ce début d’année. Pour les entreprises aux bilans fragiles (i.e. le « High Yield »), les difficultés se succèdent puisqu’après la crise de la COVID, le coût des matières premières s’envole avec la guerre en Ukraine. Bien entendu, les fournisseurs préfèreront livrer les entreprises solides, c’est pourquoi l’activité des entreprises « High Yield » est compromise, et leur solvabilité l’est également. Le risque de défaut de paiement de certaines de ces sociétés ne peut plus être écarté. Bien que les rendements réels des entreprises solides (i.e. « Investment Grade ») soient négatifs, leur solvabilité est en revanche a priori assurée et leurs rendements sont supérieurs à ceux des États. En tactique, nous restons à l’écart du « High Yield », et nous surpondérons l’ « Investment Grade » aux dépens des dettes d’États.
En début d’année, malgré des politiques monétaires décorrélées, les grandes devises fluctuaient modérément face à l’Euro. Depuis le conflit en Ukraine, les investisseurs anticipent que la croissance économique de la zone Euro sera moins forte qu’espéré, et que la BCE aura plus de difficultés à durcir sa politique monétaire. Aux États-Unis, l’inflation accélère beaucoup, mais les perspectives de croissance sont faiblement abaissées, le pays étant producteur de matières premières, son secteur de la Défense bénéficiant de nouvelles commandes, et le pays subissant une moindre compétition des entreprises européennes, ces dernières étant désorganisées par le conflit en cours. La divergence de politique monétaire transatlantique s’accentuant, l’Euro pourrait encore sous-performer, mais cela améliorerait la compétitivité des entreprises de la zone.
La COVID a désorganisé la production de beaucoup de matières premières, alors que la demande de produits industriels s’envolait. Ce déséquilibre entre l’offre et la demande expliquait la hausse initiale des matières premières, ce que le conflit en Ukraine a encore accentué. L’énergie, les céréales, quelques métaux spécifiques… concentrent les inquiétudes des investisseurs, des pénuries étant possibles, surtout si cette guerre devait se prolonger. Même dans l’hypothèse d’un conflit s’arrêtant vite, les sanctions à l’égard de la Russie ne seraient pas levées rapidement, et la volonté d’être moins dépendant du pays serait prioritaire. La volatilité sur les matières premières devrait rester forte, des prises de bénéfices sont probables, mais nous restons surpondérés pour accompagner le cycle économique en cours et pour la protection que cette classe d’actifs offre face à l’inflation.
En mars, la volatilité sur les diverses classes d’actifs des pays émergents a été très forte. Le conflit entre la Russie et l’Ukraine a évidemment pesé sur la valorisation des actifs de ces deux pays en bourse, mais leur poids cumulé était marginal dans les indices, d’où un impact direct très modéré. En revanche, l’envol de l’inflation dû aux matières premières inquiète les investisseurs internationaux pour l’ensemble des pays émergents : hausse du coût des importations et de la dette, chute des marges bénéficiaires des entreprises énergivores ou consommant beaucoup de matières premières, décrochage du pouvoir d’achat des ménages avec en fin de compte, parfois, des risques de famines et d’instabilité politique. La visibilité s’étant dégradée sur les actifs des pays émergents, seule leur faible valorisation nous encourage à maintenir une neutralité à leur égard.