Pour les actions, l’année 2019 aura été exceptionnellement profitable. L’inflexion accommodante des politiques monétaires des banques centrales est parvenue à éclipser les tensions commerciales sino-américaines, le Brexit, et autres troubles géopolitiques. Toutefois, cette progression des actions s’est faite aux dépens des valorisations puisque les bénéfices ont stagné voire reculé en moyenne : les marchés sont donc désormais bien plus chers que fin 2018. Il est dès lors essentiel que les investisseurs puissent à nouveau s’appuyer en 2020 sur des progressions de bénéfices pour justifier autrement que par le simple rendement des dividendes de s’exposer à cette classe d’actifs versatile. Mais le tassement économique en cours et l’intensité de la concurrence mondiale rendent très incertains les bénéfices à venir. Ceci nous incite à rester plutôt prudent début 2020, conservant donc notre actuelle sous-pondération aux actions.
En 2020, les obligations souveraines ont bénéficié du caractère accommodant des banquiers centraux, leurs rendements baissant et leurs valorisations s’appréciant en bourse. Toutefois, depuis la mi-août, les investisseurs envisageant un possible scénario de récession économique, dû notamment aux tensions commerciales sino-américaines, ont révisé leur jugement, provoquant une importante remontée des rendements : près de 50 points de base pour les principaux pays. Si certaines obligations d’États affichent toujours des rendements négatifs, beaucoup restituent à nouveau l’intégralité du capital emprunté. La faible visibilité économique et géostratégique actuelle, tout comme l’absence de tensions inflationnistes et le niveau très élevé de l’endettement des agents économiques, encouragent les banques centrales à rester durablement généreuses. Faute de rendements satisfaisants, nous maintenons notre neutralité à l’égard des obligations d’États.
En 2020, à l’instar des autres actifs financiers, les obligations d’entreprises ont profité des soutiens monétaires mis en œuvre par les banquiers centraux. Le rendement de certaines obligations souveraines étant parfois négatifs, ce qui signifie que le prêteur n’est pas remboursé de l’intégralité de ses capitaux, les investisseurs ont alors été incités à réorienter leurs actifs, lorsque cela leur était possible, vers les obligations d’entreprises qui, elles, versent encore des coupons. Ceci explique que le différentiel de rendement entre les obligations d’entreprises et celui des États se soit fortement contracté (60 points de base de moins que fin 2018). Le tassement économique en cours nécessite toutefois d’être désormais bien plus sélectif quant au choix des obligations d’entreprises adoptées, le risque de défauts de paiement augmentant. Nous restons surpondérés sur les obligations d’entreprises, mais sous-pondérés sur les obligations « High Yield ».
Bien que les politiques monétaires des banques centrales ne soient pas coordonnées, elles sont toutefois pour la plupart désormais convergentes, en l’occurrence accommodantes. Cette situation a favorisé une moindre volatilité entre devises, le facteur « rendement relatif » étant moins discriminant en 2019. Du fait des dissensions internes au pays causées par le Brexit, la Livre Sterling se distingue toutefois parmi les devises importantes, puisqu’elle a connu des variations de forte ampleur lors du changement de gouvernement et du vote qui s’en est suivi. Si les négociations entre Bruxelles et Londres devaient être difficiles, la parité Livre Sterling contre Euro pourrait faire l’objet de revirements additionnels significatifs en 2020. La question de l’évolution des parités entre devises, notamment celle du Dollar, sera déterminante durant les prochains mois car ayant d’importants impacts sur les performances absolues ou relatives des diverses classes d’actifs.
L’analyse de la hiérarchie des performances des matières premières en 2019 est instructive quant au contexte général dans lequel elles évoluent actuellement. En dépit de l’envol des prix du pétrole, principalement dû au maintien de ses quotas par l’OPEP, les prix des métaux industriels ont stagné, ce qui veut dire que ces derniers restent pénalisés par le tassement économique en cours et ne profitent même pas du fréquent effet d’entraînement du pétrole. Les prix des denrées alimentaires ayant fortement progressé, il convient de rester vigilant quant aux possibles tensions sociales dans certains pays émergents où le poids de l’alimentaire reste prépondérant dans le budget des ménages. Par effet de report, l’or a profité de la faiblesse des rendements obligataires due aux politiques monétaires accommodantes des banques centrales. Nous conservons une allocation neutre sur les matières premières, sauf sur l’or qui justifie d’une surpondération tactique.
La comparaison des performances entre les obligations et les actions des pays émergents en 2019 démontre que la confiance des investisseurs dans la dynamique cyclique reste timide. À l’évidence, les soutiens monétaires des banques centrales ont profité aux obligations émergentes, d’autant que le Dollar a modéré sa progression face aux devises de ces pays, soulageant les emprunteurs en devises fortes. En revanche, les actions émergentes affichent un important retard face à leurs homologues des grands pays développés, le conflit commercial sino-américain pesant tout particulièrement sur leurs perspectives bénéficiaires. Par ailleurs, d’importantes tensions sociales dans de nombreux pays (Chili, Venezuela, Argentine, Inde, etc.) contribuent à faire douter les investisseurs de l’opportunité d’investir ou non dans les pays émergents. En dépit de leur faible valorisation, nous préférons rester sous-pondérés sur les actifs émergents.