Date de publication : 5 mai 2021

La progression des marchés d’actions a continué en avril, toujours caractérisée par d’importants écarts de performance entre grands indices internationaux, notamment du fait des impacts de devises. La remontée des rendements obligataires ayant enfin marqué une pause, les sociétés de croissance ont plus particulièrement profité de cette dernière phase de hausse des actions, notamment parce qu’elles sont les plus sensibles à ce facteur. Par ailleurs, la proximité des publications de résultats trimestriels a certainement encouragé à quelques prises de bénéfices sur les thématiques cycliques ayant affiché de spectaculaires surperformances depuis le début d’année, et donc incité à des réinvestissements vers les valeurs de croissance afin de rester exposé sur les actions. Nous restons surpondérés sur les actions.

Depuis le début d’année, les rendements des obligations souveraines de la plupart des zones étaient directement liés au comportement des obligations américaines. En avril, ce lien s’est un peu estompé, les rendements américains diminuant sensiblement, alors que ceux de l’Europe ont moins profité de cette phase de détente. Pour être plus précis, on observe même au sein de l’Union Européenne une certaine divergence entre les pays solides voyant leurs rendements diminuer ou stagner et ceux des pays très endettés voyant les leurs monter encore (cf. France, Italie…). Le pic d’inflation américain, attendu d’ici à la fin du second trimestre, pourrait provoquer une nouvelle tension sur les obligations souveraines durant les prochains mois, c’est pourquoi il nous semble prématuré de se réexposer sur cette classe d’actifs. Nous maintenons notre vue à sous-pondérer sur les obligations d’État.

Les rendements des obligations d’entreprises continuent d’être dirigés favorablement ou défavorablement en fonction de l’évolution des obligations souveraines. En avril, après plusieurs mois consécutifs de très forte hausse des rendements obligataires, autrement dit des performances négatives sur ces actifs, les rendements se sont enfin détendus pour revenir au voisinage de ceux de la fin février. Les investisseurs semblent s’inquiéter un peu moins des tensions inflationnistes en cours, à moins qu’ils n’accordent plus de crédit à l’opinion des Banques centrales défendant la thèse que cette inflation sera transitoire. Confiants dans la reprise à venir, nous restons surpondérés sur les obligations d’entreprises, mais provisoirement à l’écart du « High Yield », les défauts de paiements ou faillites ne pouvant être exclus dans la phase de réouverture des économies. 

Depuis le début d’année, les performances des devises sont caractérisées par un important contre-pied sur le Dollar, et par une forte dispersion entre devises. Les investisseurs s’attendaient à la poursuite du recul du Dollar, entamé en 2020. Mais les relances budgétaires sont tellement fortes aux États-Unis qu’elles font craindre une inflation plus structurelle dans le pays, avec un pic d’ici cet été. C’est cette anticipation qui fait monter les rendements obligataires américains et encourage les investisseurs internationaux à acheter du Dollar pour investir sur ces obligations mieux rémunérées. Les devises réputées « refuge », que sont le Franc suisse et le Yen japonais, sont celles qui sont les plus pénalisées par ces arbitrages. Si le pic d’inflation américain intervenait bientôt, cela pourrait marquer aussi le pic d’appréciation relative du Dollar, et justifier certaines réallocations d’actifs. 

En dépit du reconfinement de certains pays développés, de l’apparition de certains variants, et de la situation épidémique inquiétante dans quelques pays émergents, les prix des matières premières poursuivent leur appréciation. Les investisseurs restent confiants dans la perspective d’une réouverture des économies, même si le calendrier reste imprécis. Ces hausses s’expliquent en partie par des pénuries liées à une offre insuffisante, faute d’investissements, ou car pilotée par un cartel, comme c’est le cas pour le pétrole. Par ailleurs, les très forts soutiens budgétaires et monétaires engagés, encouragent à rester sur cet actif. Enfin, la transition énergétique devrait provoquer une vague d’achats industriels durant les prochaines années. Les matières premières étant une bonne protection dans les phases plus inflationnistes, nous restons surpondérés sur cette classe d’actifs. 

Les actifs émergents ont été pénalisés depuis le début d’année par le contre-pied sur le Dollar, ce dernier s’appréciant en fin de compte. Par ailleurs, la Chine semble profiter de son avance cyclique pour réduire ses soutiens financiers, en profite pour assainir quelques établissements financiers ayant trop de créances douteuses, et reprend le contrôle partiel de certains leaders technologiques du pays. Enfin, la situation sanitaire dramatique de certains pays (Inde, Brésil…) inquiète logiquement les investisseurs. Les actifs émergents nous semblent présenter aujourd’hui une décote suffisante pour s’y réexposer plus significativement, malgré le manque de visibilité précis quant au timing. Tactiquement, nous surpondérons désormais aussi les émergents dans nos allocations d’actifs, mais en privilégiant la Chine et son cercle d’influence asiatique immédiat.

Vue des actifs – l’Éclaireur de mai 2021

Vincent Lequertier
Vincent Lequertier

Vincent Lequertier a 25 ans d’expérience en gestion d’actifs. Après une carrière à la banque d’Orsay, il est successivement directeur adjoint actions puis directeur actions. Spécialiste de la gestion allocataire, il devient en Août 2015, le responsable de la gestion allocataire chez WeSave.fr.

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