Date de publication : 3 octobre 2022

Depuis la réunion des grandes Banques centrales de Jackson Hole en août, les investisseurs s’attendent à ce que les banquiers centraux luttent encore très activement contre l’inflation. Autrement dit, les remontées de taux directeurs restent très fortes et devraient se prolonger jusqu’au printemps 2023. Paradoxalement, les signaux de bonne tenue de certaines économies, celle des Etats-Unis notamment, sont perçus comme une incitation à persister dans les durcissements monétaires. Les marchés obligataires en souffrent très directement, et ils entraînent avec eux les actions, par ajustement des valorisations et car le risque de récession future se renforce. Les rendements des deux classes d’actifs convergent désormais. Nous restons optimistes sur les perspectives d’investissement des États et entreprises, d’où notre surpondération persistante sur les actions.

La violence de la remontée des rendements obligataires est inédite depuis les années 80’ : on peut désormais parler de krach obligataire. Ce mouvement s’explique par une inflation jamais vue depuis 40 ans, s’expliquant par la COVID et la guerre en Ukraine, et contraignant les banquiers centraux à un durcissement radical de leurs politiques monétaires. Paradoxalement, les statistiques montrant une résistance de la croissance économique sont perçues comme de mauvaises nouvelles, l’objectif des banquiers centraux étant d’asphyxier temporairement l’économie pour éviter toute spirale inflationniste. Toutes les classes d’actifs obligataires s’effondrent donc actuellement. Le reflux de l’inflation devrait n’être que progressif et les rendements réels des obligations souveraines restant négatifs, nous maintenons une allocation neutre sur cette classe d’actifs.

Les Banques centrales cherchent à stopper « quoi qu’il en coûte » l’inflation en cours. C’est en effet leur mission première, et cela faisait 40 ans qu’une telle ampleur d’inflation n’avait plus été observée dans les grands pays. En durcissant les conditions de financement des économies, les banquiers centraux espèrent parvenir à empêcher qu’une spirale inflationniste ne se déploie durant les prochaines années. En conséquence, le risque de récession monte, même s’il est impossible de déterminer aujourd’hui s’il s’agirait d’une récession profonde et/ou durable. Les investisseurs exigent de ce fait des rendements de plus en plus élevés pour couvrir les éventuels risques de défauts de paiements, voire de faillites de certains émetteurs. Les rendements des obligations d’entreprises nous semblent couvrir ces risques, d’où notre surpondération sur les obligations d’entreprises.

L’une des caractéristiques majeures de l’année 2022 est l’extrême volatilité des principales devises au monde. Le Dollar est le très grand gagnant, du fait de l’agressivité de la politique monétaire de la FED, et par réflexe de refuge vers le billet vert des investisseurs. L’Euro est évidemment pénalisé par le conflit en Ukraine et par le risque de récession économique lié aux possibles pénuries énergétiques. Le Yen japonais décroche du fait de l’obstination du pays à conserver une politique monétaire accommodante. La Livre britannique s’effondre notamment du fait d’une relance budgétaire non financée du gouvernement Truss, s’ajoutant aux mauvais fondamentaux du pays post Brexit. Une inflexion de sa politique monétaire par la FED soulagerait toutes les devises. Ce facteur doit être surveillé de près pour les performances des autres classes d’actifs et donc de son épargne. 

Après une hausse impressionnante en début d’année du fait du conflit en Ukraine, le prix des matières premières rechute fortement. Les métaux industriels décrochent cette année du fait de la stratégie 0 COVID de la Chine et parce que les politiques monétaires restrictives devraient aboutir à un ralentissement économique en 2023. Le pétrole souffre lui aussi du risque de récession future. Les denrées alimentaires ont, comme souvent, un parcours plus aléatoire, lié notamment aux imprévus climatiques dans le monde. Les métaux précieux baissent du fait de la force du Dollar, ôtant du pouvoir d’achat aux éventuels acheteurs internationaux dont les devises baissent contre Dollar. Un cycle de long terme favorable aux matières premières nous semble persister (cf. dynamiques de l’investissement et de l’inflation), nous maintenons donc notre surpondération sur cet actif.

Les actifs des pays émergents restent très mal orientés cette année, bien que certains pays s’en sortent mieux que d’autres. Le réflexe des investisseurs internationaux reste celui de privilégier les actifs des pays développés lors des baisses importantes de marchés et, une fois encore, cela se vérifie cette année. Par ailleurs, la Chine étant le poids lourd des indices émergents, sa stratégie 0 COVID et sa crise immobilière pèsent sur sa croissance et sur celle de ses principaux partenaires. L’affaiblissement des devises émergentes contre Dollar implique aussi un renchérissement du coût des emprunts libellés en Dollar, donc de possibles défauts de paiements, incitant les prêteurs internationaux à la méfiance. Bien que les valorisations soient attirantes au vu des historiques passés, il nous semble préférable de rester neutre sur les actifs émergents à ce stade.

Vue des actifs – l’Eclaireur d’octobre 2022

Vincent Lequertier
Vincent Lequertier

Vincent Lequertier a 25 ans d’expérience en gestion d’actifs. Après une carrière à la banque d’Orsay, il est successivement directeur adjoint actions puis directeur actions. Spécialiste de la gestion allocataire, il devient en Août 2015, le responsable de la gestion allocataire chez WeSave.fr.

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