Coup de chaud sur les marchés financiers juste avant l’été
Les matières premières, les obligations des Etats ou des entreprises, les devises, les actions,… en juin, tous les actifs financiers ont soudainement décroché. Cette synchronisation atypique des marchés financiers est-elle le présage d’une crise boursière profonde ou bien est-ce un simple ajustement temporaire avant l’été ?
Matières premières : un problème de surproduction !
Les prix pétroliers décrochent en fait déjà depuis le début d’année 2017. L’OPEP et quelques pays alignés pour l’occasion ne parviennent pas à restreindre suffisamment leurs productions pour faire monter les prix du pétrole. Plus encore, l’ampleur des forages de schistes pétroliers américains a surpris. C’est donc un excès d’offre pétrolière et non pas une chute de la demande qui est en cause, et il n’y a alors pas d’inquiétude particulière quant au cycle économique en cours ou à venir. Le pétrole influençant les coûts des autres matières premières (cf. coûts d’extractions, de transformations, de transports,…), les prix de la plupart des autres matières premières ont diminué à leur tour. A ce stade, le recul des prix des matières premières s’explique principalement par le reflux des prix pétroliers et non pas sur un tassement économique … il n’est donc pas possible d’extrapoler ces baisses sur la fin d’année. En revanche, cela a fait reculer les anticipations d’inflation dans le monde, affectant les marchés d’obligations et les devises.
Obligations : un fléchissement de discours des Banques centrales !
Les Banques centrales ont notamment pour mission de contrôler l’inflation, ceci grâce à leurs politiques monétaires. Lorsque les risques d’inflation augmentent, les Banques centrales remontent généralement leurs taux d’intérêts, ce qui a pour effet d’atténuer l’inflation. Le recul des prix des matières premières en 2017 réduisant les risques d’inflation future, les investisseurs ont anticipé la poursuite de politiques monétaires plutôt accommodantes. De plus, cette analyse était confortée par l’immobilisme budgétaire et fiscal aux Etats-Unis, l’Administration Trump ne parvenant pas à s’entendre avec le Congrès américain. C’est pourquoi les investisseurs ont racheté des obligations d’Etats et des obligations d’entreprises en début d’année. Fin juin, à la surprise générale, plusieurs Banques centrales ont néanmoins tenu des discours soulignant le caractère temporaire de cette faible inflation, prenant à revers les anticipations des investisseurs. Ceci explique la très brutale remontée des rendements des obligations (i.e. chute des prix des obligations). La correction des marchés obligataires est donc due à une correction des anticipations financières par les stratèges et non pas à une modification radicale du scénario économique à venir.
Devises : plus de visibilité quant aux politiques monétaires ?
Au-delà des dynamiques économiques respectives entre les différents pays et des « crédibilités » respectives de chaque Etat, les devises sont aussi fortement influencées par les décisions des Banques centrales. Fin juin, l’inflexion des discours de la Banque d’Angleterre (BoE) et de la Banque Centrale Européenne (BCE) ayant tout particulièrement surpris les investisseurs, la Livre Sterling et l’Euro se sont brutalement appréciées face aux grandes devises internationales. Le Dollar a plus spécifiquement fait les frais de ces changements de perceptions de politiques monétaires. Que ce soit intentionnel ou accidentel, coordonné ou non, les Banques centrales ont donc incité les investisseurs à être plus prudents quant à leurs allocations d’actifs, d’autant que l’été approche avec des risques de moindre liquidité sur les différents marchés financiers.
Actions : un effet de contagion des autres actifs financiers ou bien une trop grande cherté ?
Les marchés d’actions sont portés par une croissance économique mondiale favorable pour 2017 et 2018, mais aussi par la faiblesse des rendements des obligations. La reprise économique contribue tout d’abord à améliorer les chiffres d’affaires et les bénéfices dégagés par les sociétés, justifiant l’intérêt que les investisseurs leur portent. Par ailleurs, les rendements des obligations étant très faibles, les actions offrent une alternative d’allocation pour une partie des capitaux à faire fructifier. L’ampleur de la reprise économique mondiale restant modeste, les sociétés de croissance attirent plus particulièrement à elles ces flux de capitaux. C’est pourquoi le doute se pose régulièrement quant à la cherté de certains marchés d’actions, notamment celle du Nasdaq qui concentre de nombreuses sociétés à forte croissance. Ces entreprises étant particulièrement sensibles à tout doute quant à leur croissance future, les violentes fluctuations des marchés obligataires et des devises ont incité les investisseurs à alléger leur exposition sur certaines valeurs technologiques emblématiques (Apple, Google, Facebook, Amazon,…) avant les publications du second trimestre. A noter que certains secteurs, les financières notamment, ont pour leur part tiré avantage du repli des marchés obligataires, ce qui a donc finalement limité la baisse d’autres indices actions (cf. S&P500 par exemple). A ce stade, il est donc difficile de savoir si la chute des marchés d’actions est due à un simple principe de précaution des investisseurs ou bien si c’est l’amorce d’un repli de plus grande ampleur. Les publications de résultats du 2nd trimestre 2017 seront donc attendues avec encore plus d’impatience qu’à l’accoutumée.
Conclusion
A ce stade, les replis des diverses classes d’actifs ne laissent pas présager d’un ralentissement économique imminent. Au contraire, la fermeté plus marquée des banques centrales sous-entend une confiance dans un scénario de poursuite de la reprise économique mondiale avec un peu plus d’inflation. Les investisseurs devront s’habituer graduellement au sevrage des excès de liquidités injectées depuis des années, cette phase de « normalisation » pouvant provoquer d’autres à-coups ponctuels sur les marchés financiers.