La normalisation de la croissance économique chinoise accélère
La croissance économique chinoise repose désormais avant tout sur ses propres forces La Chine a longtemps été considérée comme «l’atelier du monde». Son modèle économique reposait alors sur une main d’œuvre peu chère, permettant de doper la compétitivité des entreprises étrangères qui décidaient d’y délocaliser leurs productions. Le pays privilégiait alors les exportations, ceci afin d’obtenir les devises étrangères lui permettant de mettre en œuvre son développement économique et social. Ce positionnement a conduit à de très vastes déplacements de population des campagnes vers les villes, a engendré une spéculation immobilière chronique, et a nécessité de développer de façon considérable les infrastructures du pays. Toutefois, depuis plusieurs années, ce modèle de développement s’essouffle. Tout d’abord, l’immobilier et les infrastructures ayant fait l’objet d’investissements massifs et récurrents pendant de très longues années, le tassement de leur croissance était inéluctable … c’est là l’un des motifs majeurs de l’actuelle inflexion du PIB chinois. Par ailleurs, le coût de la vie étant bien plus élevé dans les villes que dans les campagnes (cf. spéculation immobilière), les salaires des employés chinois ont dû être très fortement rehaussés, ce qui affecte désormais structurellement la compétitivité du pays. L’attractivité par le coût de la main d’œuvre s’effaçant, l’incitation pour les investisseurs étrangers à s’implanter en Chine est alors nettement moindre … les excédents commerciaux s’estompent, et la croissance économique chinoise repose donc désormais avant tout sur ses propres forces.
La transformation économique du pays est avant tout qualitative
Les matières premières, victimes de la transformation économique chinoise en cours Les hausses de salaires accordées aux employés chinois ont facilité l’émergence d’une classe moyenne et, plus généralement, ont autorisé une très forte élévation du pouvoir d’achat du pays. Par ailleurs, la monnaie chinoise s’étant fortement appréciée face à la plupart des devises étrangères, le pouvoir d’achat du pays s’en est retrouvé renforcé d’autant (mais sa compétitivité pénalisée en revanche!). C’est pourquoi, aujourd’hui, la consommation des ménages contribue désormais à plus de la moitié du PIB chinois. Cette métamorphose économique a été accentuée par la prolifération d’entreprises de services dédiés à la population locale. Dès lors, l’industrie chinoise a vu sa contribution économique régresser et sa rentabilité se dégrader. Plutôt que de cibler l’exportation, la production industrielle est désormais de plus en plus dédiée au consommateur national. De plus, puisque les capitaux en provenance de l’étranger sont devenus plus rares, le pays privilégie alors les investissements de productivité plutôt que ceux de capacité. Désormais, les chefs d’entreprises chinois cherchent à optimiser leurs processus de productions, ce qui explique en partie que le pays soit désormais moins glouton en matières premières.
Mesurer la croissance économique chinoise se complique alors.
Le doute quant à la véracité des statistiques chinoises va s’intensifier Dans tout pays, les contributions au PIB des activités de services sont toujours bien plus difficiles à mesurer que ce n’est le cas de l’industrie ou de l’agriculture. C’est pourquoi une marge d’erreur de plus en plus forte entache désormais les publications macroéconomiques du pays. D’autre part, les enveloppes budgétaires des provinces et les promotions des hauts fonctionnaires chinois restent en partie indexées sur les succès économiques qu’ils affichent … il est alors tentant de surestimer certaines données! Enfin, les statistiques chinoises ont toujours été un outil de propagande pour les gouvernements successifs du pays, ceci afin de démontrer leurs compétences, tout autant que la supériorité de leur modèle de développement. La rapidité avec laquelle les statistiques y sont collectées, traitées et publiées ne peut alors que jeter le doute quant à la fiabilité des données communiquées. Puisque les autorités «pilotent» la croissance au travers d’importantes injections monétaires, budgétaires, fiscales,…, les à-coups de croissance devraient être plus fréquents et visibles. C’est pourquoi les stratèges sont toujours plus sceptiques quant à la troublante progressivité du tassement économique chinois. Il convient donc d’intégrer avec d’autant plus de précaution les données chinoises dans les modèles de prévisions.
L’intégration financière internationale du pays se fait dans la douleur.
L’apprentissage du capitalisme est difficile pour un pays communiste Avec 13.5% du PIB mondial, la Chine est désormais la seconde puissance économique internationale. Afin d’asseoir ce statut, les dirigeants du pays souhaitent bénéficier d’une meilleure représentation au sein des instances et organes de décisions économiques internationaux. Pour ce faire, une plus grande utilisation de la devise nationale (le Yuan) est encouragée, à la fois en tant que devise de transaction, mais aussi comme devise de «réserve» au sein des banques centrales étrangères. Une meilleure convertibilité du Yuan est pour cela souhaitable, mais l’annonce de la dévaluation de la devise chinoise en août 2015 a été particulièrement contre productive, puisqu’elle a eu pour effet de paniquer les observateurs qui y ont vu un aveu de faiblesse économique du pays. Par ailleurs, la population chinoise a été incitée précipitamment, et cela sans une éducation financière préalable suffisante, à subventionner l’économie nationale au travers de la bourse … c’est un véritable krach boursier qui a en fin de compte sanctionné cette autre initiative gouvernementale. L’apprentissage de certains aspects majeurs du capitalisme se fait donc dans la douleur, ce qui altère la confiance des investisseurs nationaux ou étrangers dans les perspectives du pays.
En fin de compte, les défis économiques et sociaux auxquels la Chine doit faire face sont considérables, et ils seront sources d’inquiétudes récurrentes pour les observateurs et les investisseurs.