Oublions bien vite 2018, année du “Chien”, le nouvel an chinois commence le 5 février et il sera placé sous la protection du “Cochon de Terre”. Dans la culture chinoise, le Cochon est symbole de richesse, et il faut le souhaiter le plus “potelé” possible. Pour les Occidentaux, cet animal est bien entendu le symbole de l’épargne, et il faut tout autant lui souhaiter d’être “bedonnant”. En ce début d’année, les fondamentaux politiques, économiques et financiers placeront-ils l’épargnant à la diète ou bien permettront-ils à nouveau de “faire du gras” et, si tel est le cas, quelle allocation d’actifs serait alors la plus appropriée ?
Brexit : Cochon qui s’en dédie !
Deux années de négociations entre le Royaume-Uni et l’UE (Union Européenne) à essayer laborieusement de formaliser des modalités “satisfaisantes” du Brexit pour aboutir finalement par le rejet du texte à la Chambre des Communes : 432 opposants pour seulement 202 votes favorables ! Les pro-Brexit ont rejeté cette proposition car la jugeant trop favorable à l’UE, alors que les opposants au Brexit l’ont repoussée car s’efforçant toujours d’annuler purement et simplement le processus de sortie.
À l’évidence, le Parlement britannique cherche désormais à reprendre la main sur ce sujet ultra-sensible afin d’éviter un “no-deal” alors que les industriels de tous bords, les électeurs, et même Élisabeth II font tous pression pour qu’une telle issue n’intervienne pas. Le principal point d’achoppement reste encore et toujours celui de la frontière non physique à instaurer entre les deux Irlandes, le fameux “backstop”. Le Parlement voudra certainement obtenir auprès de l’UE un délai supplémentaire, au-delà de la date du 29 mars 2019, afin de réduire l’incertitude relative à cet aspect du traité, voire obtenir d’autres amendements. Pour l’UE, il est très difficile de se montrer conciliante sur ce point précis car il faut impérativement décourager toute velléité de réplique du Brexit par un autre de ses membres, et la proximité des élections européennes en mai 2019 interdit d’autant plus toute manifestation de faiblesse. Pour qu’un délai additionnel puisse être accordé par l’UE, il faudrait a priori qu’il soit justifié par un motif sérieux : un nouveau référendum, des élections anticipées au Royaume-Uni,… Si cet éventuel délai devait dépasser les 3 mois, l’UE serait en principe confrontée au paradoxe d’un Royaume-Uni votant lui aussi lors des élections européennes en mai, et ayant donc une influence directe sur la composition du prochain Parlement européen qui doit lui-même statuer sur l’avenir de leurs relations !
À l’approche des élections européennes, l’UE déploie finalement pour le Brexit une énergie considérable qui aurait pu être consacrée à définir ou à consolider les relations entre ses pays membres, ou encore à faciliter le consentement et l’adhésion au projet européen ! La confusion la plus complète continue de régner autour du Brexit, mais le pragmatisme devrait finalement l’emporter car de toute évidence, mieux vaut une sortie encore négociée que le chaos d’un “no-deal”. En fin de compte, tous ces efforts pourraient même avoir été déployés inutilement puisque l’UE a laissé légalement la porte ouverte à une décision unilatérale du Royaume-Uni de réintégrer la zone, l’article 50 du Traité de Lisbonne étant considéré comme révocable : “L’expérience est le nom que chacun donne à ses erreurs” (Oscar Wilde) ?
États-Unis et Chine : copains comme cochons ?
À en croire certains tweets de D.Trump, les relations entre la Chine et les États-Unis seraient presque revenues au beau fixe. Les deux plus grandes puissances de la planète resteront en réalité bien entendu durablement en compétition pour le leadership mondial. Les tensions commerciales affectant à présent manifestement chacune des deux économies, elles auraient beaucoup à perdre à une dégradation supplémentaire de leurs relations : l’hypothèse d’une détente est donc désormais plus plausible. Par ailleurs, le bourbier du “shutdown” de l’administration américaine devrait inciter D.Trump à tenter d’afficher un succès d’ampleur à l’international, contrepoids de cette déconvenue sur le territoire national.
Le terme des négociations entre la Chine et les États-Unis est programmé pour la fin février, des sur-taxations sur les biens et services devant être rétablies au-delà de cette date butoir en cas d’échec des tractations. Pour preuve de sa bonne volonté, la Chine devrait notamment accentuer ses “engagements” à acheter plus de produits américains (biens agricoles,…) et à faciliter l’accès à son marché domestique (finance,…). Mais plus encore qu’un rééquilibrage “quantitatif”, c’est un rééquilibrage “qualitatif” qu’attendent les Américains : les échanges doivent être “équitables” ! Les États-Unis considérant que depuis des années la Chine “siphonne” ses expertises technologiques sans en payer le juste prix, il sera très difficile de trouver un terrain d’entente satisfaisant pour tout ce qui touche à la propriété intellectuelle, tout accord étant alors potentiellement incomplet et donc instable sur la durée. De plus, les revirements soudains et brutaux de D.Trump sont fréquents, incitant à la prudence quant à la pérennité d’une éventuelle réconciliation commerciale entre ces deux nations. C’est pourquoi la Chine garde en réserve des instruments de soutiens monétaires, budgétaires et fiscaux, de façon à parer tout choc qui pourrait mettre en péril sa croissance économique et son équilibre politique et social. Pour les investisseurs, il sera important d’analyser si le réchauffement commercial entre les deux pays ne se fait pas aux dépens d’autres zones (l’Europe notamment ?), incitant alors à ajuster certaines allocations financières.
Politiques monétaires et budgétaires : attention à ne pas tuer le cochon !
Pour les dirigeants internationaux et pour les banquiers centraux, la principale préoccupation est que la croissance économique ne fléchisse pas brutalement. Partout dans le monde, les équilibres politiques et sociaux sont en effet contestés, et tout ralentissement économique ne ferait qu’intensifier les rancœurs. Les populations ont ainsi consenti à beaucoup de sacrifices depuis la crise des subprimes, et elles sont généralement déçues par leur “retour sur investissement”, alors même que la croissance économique s’est pourtant redressée. Ce ressentiment se traduit notamment par l’éviction des partis politiques traditionnels au profit de courants populistes ou alternatifs. C’est tout l’enjeu par exemple des élections européennes de mai 2019 : quel équilibre parlementaire pourra être composé, et les nationalismes seront-ils tels que la cohésion du projet européen s’en ressente durablement (cf. Brexit, immigration,…) ?
Afin d’atténuer la menace de leur propre éviction, les dirigeants politiques sont tentés de laisser filer les déficits budgétaires, reportant sur leurs successeurs la charge des réformes structurelles qui seraient pourtant nécessaires. Pour ce qui est des banquiers centraux, ils ne veulent pas être tenus pour responsables d’une crise financière qui dégénérerait en crise économique : mieux vaut plutôt maintenir un discours bienveillant et/ou préserver une politique monétaire accommodante. Le très brutal décrochage des marchés financiers fin 2018 a mis sous pression simultanément les dirigeants politiques et les banquiers centraux, d’où leurs discours et leurs initiatives à nouveau pro-croissance économique. Pour les investisseurs, tant que la dynamique mondiale ne donnera pas des signaux de reprise significative, l’hypothèse de la persistance de soutiens monétaires et budgétaires devrait s’imposer, ce qui est déterminant pour les choix d’allocations d’actifs.
Marchés financiers : du lard ou du cochon ?
Un cycle économique mature n’est pas nécessairement le signal avancé d’une récession imminente. C’est pourtant le raccourci que plusieurs investisseurs et stratèges ont semble-t-il fait fin 2018, supposant notamment que la durée atypique du cycle de croissance américain (déjà neuf années consécutives d’expansion) préfigurait un arrêt brutal de la croissance du pays. La vigilance des dirigeants politiques et des banquiers centraux du monde entier atténue pourtant le risque d’un choc soudain, même si une erreur d’appréciation de leur part est bien entendu possible et que la coopération entre les États est bien moins fluide que par le passé.
La situation de l’endettement cumulé dans le monde est en revanche indiscutablement préoccupante aujourd’hui, d’autant qu’il n’a fait que croître depuis la crise des subprimes : 244 200 Mds $ désormais, soit 86 000 $ par habitant ou bien encore plus de 2.5 fois le revenu annuel moyen par tête ! Il est donc indispensable que les taux d’intérêts ne montent pas trop afin d’éviter l’éventuelle asphyxie de certains emprunteurs. L’inflation allégeant la charge de la dette, c’est le niveau des taux d’intérêts réels qu’il convient plus précisément de surveiller. Plus encore qu’à l’habitude, la pertinence des analyses et des projections économiques des banquiers centraux sera importante pour éviter toute erreur de politique monétaire, et donc des taux d’intérêts réels excessifs.
La seconde inquiétude légitime des investisseurs est de soupeser si le pic des marges bénéficiaires n’a pas déjà été atteint par les entreprises. Si tel était le cas, et malgré la croissance économique encore attendue en 2019, la rentabilité et la solvabilité des sociétés se dégraderaient et elles seraient contraintes de réévaluer leurs projets d’investissements, voire de réduire leurs effectifs, accentuant d’autant le tassement économique en cours. Dans ce contexte, la capacité des groupes à imposer leurs prix à leurs clients et à leurs fournisseurs (“pricing power”) est alors tout aussi importante que l’évolution des prix des matières premières et des salaires (maîtrise des coûts). Face à cette inquiétude, les publications de résultats trimestriels sont l’occasion pour les dirigeants d’entreprises de faire le point sur leurs performances opérationnelles récentes et sur leurs perspectives. Sans surprise, le contexte politique international confus et le tassement de la croissance mondiale incitent à tenir des discours prudents mais, malgré ces réserves des dirigeants, leurs titres montent généralement en bourse : les investisseurs craignaient donc que la situation ne soit plus dégradée que ce qui leur est finalement décrit.
La plupart des investisseurs ayant adopté à l’excès le “principe de précaution”, le risque principal pourrait être aujourd’hui pour eux de voir quelques bonnes nouvelles s’égrener et les actifs réputés risqués monter fortement, car il serait très difficile de justifier à la clientèle d’avoir perdu de l’argent en 2018 et de rater la hausse. La vigilance est aujourd’hui indispensable, mais le pessimisme probablement prématuré : les allocations d’actifs doivent donc être gérées de façon beaucoup plus tactique et dynamique que durant les dernières années !
Quelques considérations boursières :
Le positionnement boursier des investisseurs est généralement prudent depuis la fin 2018, ce qui signifie que les actifs réputés “risqués” ont simultanément retrouvé un potentiel d’appréciation au travers de leur “valorisation” mais aussi en matière de “flux” potentiels, à condition toutefois que quelques bonnes nouvelles émergent ou que certaines craintes s’estompent. Les principaux risques durant la première moitié de l’année relèvent plus du politique (Brexit, tensions commerciales, élections européennes,…) que de l’économique, d’où la complexité pour les investisseurs d’allouer sereinement leurs capitaux entre les diverses classes d’actifs.
L’endettement mondial est élevé et les États doivent pour la plupart accroître leurs émissions obligataires (cf. déficits budgétaires), fragilisant d’autant le potentiel résiduel des obligations souveraines en bourse, et cela alors même que leurs rendements sont souvent modiques. La rémunération procurée par les obligations souveraines étant faible, la protection qu’elles offrent n’est réellement pertinente que lors des stress financiers importants.
Les obligations d’entreprises proposent des rendements bien plus attrayants, mais restent soumises au degré de solvabilité des émetteurs, d’où une nécessaire sélectivité.
La baisse des actions en 2018 a frappé assez indistinctement toutes les tailles de capitalisations, de styles de gestion, de zones géographiques,… les opportunités d’investissements semblent donc très nombreuses, mais le critère de la liquidité boursière nous semble rester discriminant, quitte à renoncer à certains potentiels de gains. Nous préférons par exemple privilégier les valeurs de croissance (Nasdaq notamment) plutôt que de chercher à capturer le potentiel rebond des actions émergentes ou des petites et moyennes capitalisations, car dans un contexte de tassement de la croissance mondiale et où les marges bénéficiaires sont déjà élevées, les valeurs de croissance et ayant un fort “pricing power” nous semblent justifier d’une prime de valorisation.
Pour ce qui est des matières premières, l’or apporte selon nous une véritable source de diversification financière dans une allocation alors que les métaux industriels et le pétrole dépendent trop de l’issue encore incertaine à ce jour des négociations commerciales sino-américaines.
En fin de compte, espérons que ces convictions et ces allocations ne nous réservent pas finalement un tour de cochon !
SYcFjxEVCIB
comment
ZoImjgJi
VKPJaHFrxMhfWiu
SfhlRODPAKduYvzB
MZyglDhp
YMuZQOewfgW
wUDAqlXM
kqBQptbvfEeIKF
comment
comment