Date de publication : 2 mai 2025

Le mois d’avril a été chaotique sur les marchés financiers, suite à l’annonce des droits de douane appliqués par les États-Unis. Leur intensité, et le fait que 10% minimum soient appliqués à tout le monde, a en effet surpris les investisseurs du monde entier. Le décrochage des actions a été très violent, tout comme celui du Dollar, et en fin de compte même les obligations américaines ont baissé. Ce dernier facteur a poussé l’Administration Trump à rétropédaler et à accorder un délai de 90 jours aux négociations commerciales bilatérales. Les publications de résultats ont favorablement surpris du fait d’effets de stockages avant les droits de douane, mais le flou est très fort quant aux perspectives. Nous conservons notre surpondération sur les actions car une désescalade commerciale est en cours et que les baisses de fiscalité sur les entreprises et ménages restent à venir.

En avril, le marché obligataire a été très agité. Les tarifs douaniers américains ont tout d’abord provoqué un report favorable aux obligations. Toutefois, les investisseurs du monde entier ont commencé à douter de la parole et de la fiabilité de la signature américaine, d’où un violent retournement à la hausse des rendements des obligations américaines. Pour stopper ces flux vendeurs d’obligations américaines, l’Administration Trump a rapidement atténué le stress commercial en accordant un délai de négociation de 90 jours. A noter que durant cette phase de stress obligataire, les obligations européennes n’ont pas subi la tension observée par leurs homologues américaines. Nous restons neutres à l’égard des obligations souveraines, les obligations d’entreprises nous paraissant offrir encore un couple “rendement-risque” plus attrayant. 

En avril, la performance des obligations a été erratique. L’annonce des droits de douane américains a instillé le doute quant aux perspectives économiques et à la capacité des entreprises à dégager des bénéfices. En effet, ce protectionnisme, surtout lorsqu’il est suivi de mesures de rétorsions, rend incertains les débouchés des entreprises et le coût de leurs approvisionnements. La trésorerie des entreprises devenant alors plus incertaine, le risque de défaut de paiement sur les obligations d’entreprises est redevenu une question importante. Les obligations “high yield” en ont logiquement été les plus pénalisées. L’Administration Trump étant redevenue plus conciliante, et les baisses de fiscalité sur les ménages et entreprises restant à venir, nous maintenons notre surpondération sur les obligations d’entreprises, préférant néanmoins en priorité les entreprises les plus solvables.

L’instauration de droits de douane par les États-Unis a profondément perturbé les devises mondiales. Le Dollar a décroché, les investisseurs internationaux doutant de la “gouvernance” américaine et de la qualité de la signature du pays. Diverses institutions internationales ont donc pris le parti de mieux diversifier leurs devises en réduisant la part du Dollar détenue en portefeuille. Le Yuan chinois est resté étroitement corrélé au Dollar, les autorités chinoises ne voulant pas se faire reprocher de manipuler leur devise. L’Euro a été parmi les principaux gagnants de cette phase de rééquilibrages entre devises, dans la mesure où il s’agit d’une monnaie importante et où la “gouvernance” paraît plus prévisible. Dans ce contexte de guerre tarifaire, il faut être très vigilant quant aux fluctuations des devises, ces dernières pouvant affecter fortement les performances des actifs en bourse.

Les matières premières ont connu des performances très dispersées en avril. La décision de l’Administration Trump d’imposer des droits de douane au monde entier a fait craindre un fort décrochage de la croissance économique mondiale, d’où la violente chute des matières premières énergétiques. De plus, l’OPEP+ appuie sur les prix en mettant énormément de pétrole sur le marché. La Chine ayant décidé de faire front face à l’hostilité américaine en soutenant son économie, les métaux industriels sont de ce fait parvenus à se redresser en fin de mois d’avril. Les denrées agricoles ont été elles aussi pénalisées par le protectionnisme américain, notamment parce que cela affecte le pouvoir de pays acheteurs de ces denrées. L’or et les métaux précieux ont été les grands gagnants durant cette période. Nous maintenons à ce stade notre surpondération sur cet actif. 

Alors que le protectionnisme américain aurait dû pénaliser les pays émergents, leurs actifs se comportent plutôt mieux que ceux des pays développés. La première explication est que le fort recul du Dollar allège la charge d’intérêt pour les pays ou entreprises endettés en Dollar. Par ailleurs, lorsqu’il faut importer des produits de l’étranger facturés en Dollar, cela leur coûte moins cher : leur pouvoir d’achat s’est temporairement amélioré. Si les actifs émergents progressent en ce début d’année, c’est probablement surtout parce qu’une vague de réallocation d’actifs est en cours des États-Unis vers le reste du monde, les investisseurs internationaux reconsidérant leur surexposition aux actifs américains. La politique économique à venir de D.Trump étant difficilement prévisible, il nous semble préférable de conserver une exposition neutre aux émergents.

Vue des actifs – l’Éclaireur mai 2025

Vincent Lequertier
Vincent Lequertier

Vincent Lequertier a 25 ans d’expérience en gestion d’actifs. Après une carrière à la banque d’Orsay, il est successivement directeur adjoint actions puis directeur actions. Spécialiste de la gestion allocataire, il devient en Août 2015, le responsable de la gestion allocataire chez WeSave.fr.

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